Un particulier ne peut traiter des données extraites du registre du commerce que s’il peut produire un motif justificatif. L’analyse de crédit ne peut être considérée comme motif justificatif que si le tiers peut justifier d’un intérêt à obtenir ces données.
Selon ses propres déclarations, une entreprise reprend les données du registre du commerce publiées dans la Feuille officielle suisse du commerce FOSC et les publie sur son site web. Son objectif est de permettre d’accéder à toutes les entreprises, personnes et publications enregistrées dans le registre du commerce depuis 1996. Dès lors, lorsque l’on introduit un prénom et un nom dans un moteur de recherche Internet, on obtient comme résultat un lien sur le portail Internet de l’entreprise en question. Le site de celle-ci mentionne toutes les inscriptions relatives à la personne recherchée figurant dans la FOSC et il est également possible de demander des informations économiques sur son entreprise.
De nombreuses personnes se sont plaintes de ce genre de publication. L’entreprise défend le point de vue selon lequel elle met les données de la FOSC telles quelles à la disposition des internautes et que le contexte spécifique du registre officiel est ainsi sauvegardé. En outre, elle invoque pour cette forme de traitement des données le motif justificatif de l’analyse de crédit mentionné dans la LPD.
Le simple fait que le registre du commerce soit public ne signifie pas qu’une entreprise puisse reprendre son contenu et traiter les données en question sans tenir compte de la LPD. Le but premier et principal de la publication des données du registre du commerce est la sécurité du droit dans les affaires et la protection de la bonne foi (fonction de publicité). Le Code des obligations a donné cette tâche et la responsabilité du registre du commerce aux autorités compétentes et non à des particuliers. L’entreprise en question ne peut donc pas se fonder sur ce motif justificatif pour traiter des données. Quelle que soit la forme de réutilisation de données personnelles, elle a besoin d’un motif justificatif conforme à la loi sur la protection des données.
Le motif justificatif invoqué par l’entreprise (l’analyse de crédit) permet de traiter des informations concernant la solvabilité d’une personne et, dans certaines conditions, de les communiquer à des tiers. Selon la loi, on ne peut communiquer à des tiers que les données dont il a besoin pour conclure ou exécuter un contrat avec la personne concernée. Cela implique que le tiers puisse se prévaloir d’un intérêt s’il veut obtenir ces données (par ex. négociations contractuelles en cours avec la personne concernée). La simple curiosité d’un internaute ne suffit pas. La personne traitant les données est chargée de vérifier la présence de cet intérêt. La question se pose de savoir comment procéder à cette vérification dans le cas d’une publication accessible sans restriction sur Internet.
A la suite de notre intervention, l’entreprise mentionnée nous a informés qu’elle était prête à publier ces données uniquement si la personne intéressée pouvait démontrer ou rendre vraisemblable de manière appropriée un intérêt à leur obtention. Nous allons suivre l’évolution de cette affaire et vérifier les mesures prises.
[Juillet 2006]